source : AD86 - Journal de la Vienne (Affiche, annonces et avis divers de Poitiers)

Jeudi 18 mars 1813

Notre département vient de perdre un de ses habitants les plus distingués, un de ces magistrats les plus recommandables, Antoine René Hyacinthe Thibaudeau né à Poitiers en 1737. Ses études et son goût le portèrent à embrasser la carrière du barreau, auquel sa famille était anciennement attachée.

Il fut reçu avocat en 1760.

Ses connaissances en jurisprudence et son talent pour la plaidoirie l'avait déjà placé au premier rang, lorsque l'établissement à Poitiers d'un conseil supérieur, en 1770, lui fournit de nouvelles occasions d'étendre sa réputation.

Ses grandes occupations ne le détournèrent de l'étude des lettres ; il leur consacra ses loisirs. En 1782, il publia un Abrégé de l'Histoire du Poitou, ouvrage estimé, et qui avait justifié de nombreuses et savantes recherches.

Nommé procureur-syndic du tiers état à l'assemblée provinciale, il se concilia l'estime des trois ordres qui la composaient.

Élu député à l'assemblée constituante, il fit parti de plusieurs comités, et s'y distingua par des vues sages et profondes, des opinions modérées, et par son attachement au gouvernement.

Rentré au sein d'une famille nombreuse qu'il chérissait, ses concitoyens ne tardèrent pas à lui donner de nouvelles marques de leur confiance, en le nommant procureur-général-syndic du département ; il justifia leur choix, il exerça ses fonctions avec impartialité, fermeté et désintéressement, qualités distinctives d'un grand caractère.

Tant de titres à la considération publique devinrent bientôt des motifs de proscription ; il la suporta avec calme.

Echappé à la tourmente révolutionnaire, il devint président du tribunal criminel. Dans cette fonction difficile et délicate, il se montra tellement supérieur à ceux qui l'avaient devancé, qu'il fit craindre alors qu'on ne pût le remplacer.

Une si belle réputation attira l'attention du Héros auquel le gouvernement fut confié. Sa Majesté nomma Monsieur Thibaudeau président du tribunal d'appel.

Devenu membre du corps législatif en l'an 10, Sa Majesté dégna l'honorer d'une bienveillance particulière, et lui conféra l'ordre de la Légion d'honneur.

Il touchait au terme de ses fonctions législatives, lorsqu'un accident grave fit craindre pour sa vie. De cette époque date la longue et cruelle maladie qui l'a conduit au tombeau.